• **Les heures souterraines** de D.de Vigan

      Mathilde et Thibault ne se connaissent pas. Au cœur d'une ville sans cesse en mouvement, ils ne sont que deux silhouettes parmi des millions. Deux silhouettes qui pourraient se rencontrer, se percuter, ou seulement se croiser. Un jour de mai. Les Heures souterraines est un roman vibrant et magnifique sur les violences invisibles d'un monde privé de douceur, où l'on risque de se perdre, sans aucun bruit.

     

    2ème lecture commune,2ème excellent livre!  J'ai été bouleversée par le destin de ces deux êtres ,Mathilde et Thibault ,qui vivent tous les deux à Paris mais ne se connaissent pas.

    Tous les deux sont des écorchés de la vie.


    Je vais parler d'abord de Thibault medecin ,qui ,contre sa volonté ,contre son amour pour une femme,se sépare d'elle car il comprend qu'ils ne sont pas faits pour etre ensemble.Rien ne les lie sinon leur desir sexuel et Thibault a besoin de plus.


    "Il est trop sensible,trop épidermique,trop impliqué,trop affectif.Pas assez lointain,pas assez chic,pas assez mystérieux.Il n'est pas assez."

     

    "Il ne savait pas l'aimer.Il ne savait pas la faire rire,la rendre heureuse.Il l'aimait avec ses doutes,son désespoir,il l'aimait depuis le plus sombre de lui même,au coeur de ses lignes de faille,dans la pulsation de ses propres blessures.

    Il l'aimait avec la peur de la perdre,tout le temps"

    .

    C'est donc le parcours sans Lila qui nous est décrit fait de souffrances et d'espoirs.(peut etre va t elle rappeler?)C'est un homme qui se noie et se réfugie dans son travail dans une ville qu'il aime et qu'il connait par coeur, dans ses moindres recoins.Mais au fil des heures,ce Paris semble se refermer sur lui,l'emprisonner dans son réseau .


    "La ville l'étouffe,l'oppresse.Il est fatigué de ses hasards,de son impudeur,de ses fausses accointances.Il est fatigué de ses humeurs feintes et de ses illusoires mixités.La ville est un mensonge assourdissant".

     

    Et puis il y a Mathilde et c'est sans doute le personnage qui m'a encore le plus touchée,bouleversée...Elle travaille dans une société à un poste important et pourtant insidieusement la machine déraille...C'est le harcelement moral dans toute sa cruauté,sa perversité qui est décrit minutieusement,démonté pas à pas...Pour l'avoir vécu je me suis dit que Delphine de Vigan avait connu quelqu'un qui avait été touché par cette machine effroyable qui broie tout sur son passage ou qu'elle avait fait une enquête approfondie.Car tout y est!! Les dossiers non remis,les petits riens qui ne semblent ,pris isolement,pas graves mais qui lentement broient,anéantissent la personne psychique.Toutes les étapes sont décortiquées ,analysées tant du point de vue du ressenti de Mathilde que des manières d'être de ses amis et collègues.La mise en quarantaine sociale,le bureau placard où elle n'a rien à faire....

     

    "Alors peu à peu,Nathalie,Jean, Eric et les autres ont renoncé à franchir la porte de son bureau, à lui demander conseil,ils ont trouvé l'appui dont ils avaient besoin.Ils ont choisi leur camp.(...) par lâcheté plus que par malveillance."

     

    "L'entreprise instruit,consigne,considère la situation sans interroger sa raison d'être ,sans remettre en cause son bien-fondé et, en vertu de cette même logique ,admet que Mathilde se voie dépossédée de son travail.Puisqu'elle est incompatible."

     

    "Aujourd'hui il lui semble que l'entreprise est un lieu qui broie.Un lieu totalitaire ,un lieu de prédation,un lieu de mystification et d'abus de pouvoir,un lieu de trahison et de médiocrité."

     


    Et bien entendu sa famille souffre.Ses 3 enfants,pas tres grands,font ce qu'ils peuvent pour aider leur maman qu'ils voient dépérir,sombrer..Elle s'en veut de ne plus pouvoir réagir,tente de se battre mais l'entreprise de démolition est la plus forte ...elle lâche.

     

    A quelques reprises les hasards de la vie font que Mathilde et Thomas sont presque mis à plusieurs reprises en présence l'un de l'autre...A chaque fois je me suis dit que peut être un jour...que D.de Vigan allait nous tirer de ce désespoir qui nous envahit page après page ...Mais non...Elle est allée jusqu'au bout de sa logique,avec un style fluide,prenant...semant ses graines de malheur sans beaucoup de goulées d'air frais.Il aurait fallu si peu de choses pour que tout finisse bien..


    Il lui a semblé que cette femme et lui partageaient le même épuisement,une absence à soi même qui projetait le corps vers le sol.Il lui a semblé que cette femme et lui partageaient beaucoup de choses .C'était absurde et puéril,il a baissé les yeux.

     

    Rien ne nous est épargné.La vie des personnages ne voient guère de bout de tunnel,la ville est comme une araignée qui les enserre et les étouffe.

     

    Emporté par le flot dense et désordonné il a pensé que la ville  toujours imposerait sa cadence,son empressement et ses heures d'affluence,qu'elle continuerait d'gnorer ces millions de trajectoires solitaires,à l'intersection desquelles il n'y a rien,rien d'autre que le vide ou bien une étincelle,aussitôt dissipée.

     

    Livre fort,pesant,à lire quand on a le moral bien accroché. 

     

    Lecture commune avec  


    Reveline (La bibliothèque à nuages),

    Valou (Les quotidiennes de Val),

    Sharon (Le Blog de Sharon),

    Fafa (Au Fil des lignes),

    George (Les livres de George),

    Mélo (Les songes et les livres de Mélo) et

    Quartier Livre

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  • Commentaires

    1
    Lundi 30 Mai 2011 à 07:42
    Pascale

    Bonjour, je fais partie également de cette lecture commune, je te félicite pour ton très beau billet. J'ai adoré ce livre aussi, de belles réflexions, malgré la colère qui grondait à cette lecture... je le conseillerai à bien des personnes qui ont du mal à comprendre le système des grandes entreprises, celles qui vivent ce genre d'harcèlement, pour éclairer ce mal et savoir dire STOP !

    tu n'es pas très loin de chez moi, Ardennaise... une ado aussi de 17 ans, et une plus petite de 11 ans...

    bonne journée

     

    2
    Lundi 30 Mai 2011 à 09:15
    pichenette

    Je l'ai lu à sa sortie. Très bon livre. Et excellente jeune auteure dont je lis tous les livres!

    3
    Lundi 30 Mai 2011 à 13:17
    keisha

    J'avais beaucoup aimé No et moi, mais n'ai pas continué. Ceci étant, je note qu'il vaut mieux être dans un moment rose pour attaquer cette lecture.

    4
    Lundi 30 Mai 2011 à 14:01
    Reveline

    Ta critique est intéressante car je te sens en empathie avec les personnages. Chose que je n'ai pas réussi à faire. Je ne suis pas parvenue à m'immerger en eux et dans l'histoire.

    5
    Lundi 30 Mai 2011 à 14:06
    gridou

    J'ai entendu parler (en bien) de cette auteur(e) mais je ne l'ai jamais testée. Je note son nom dans un coin (comme beaucoup d'autres hi hi!)...pour une lecture prochaine

    6
    Lundi 30 Mai 2011 à 14:42
    Audrey

    Effectivement, nos avis se rejoignent complètement. Je pense certainement lire d'autres livres de cette auteure.

    7
    Lundi 30 Mai 2011 à 14:42
    Alex-Mot-à-Mots

    Un roman terrible, pour une auteure au si joli nom.

    8
    Lundi 30 Mai 2011 à 15:47
    Zazimuth

    Il est dans ma liste à lire et ça me conforte dans mon idée !

    9
    Lundi 30 Mai 2011 à 16:24
    Tiphanie

    La fin est représentative au final de ce qui se passe dans la vie de tous les jours. Tous ces gns que l'on croise, que l'on regarde ou pas du tout bien souvent, mais qui ne font que croiser notre chemin.

    10
    Lundi 30 Mai 2011 à 19:57
    Anis

    Et moi aussi. j'ai beaucoup aimé comme toi ce livre. Ce qui m'a le plus frappée, c'est cette espèce de lucidité sur la fragilité des relations humaines.

    11
    Lundi 30 Mai 2011 à 19:58
    FéAsphodèle

    ton billet est très émouvant, ça sent le vécu !! Perso, j'ai subi des tentatives (et pas qu'une) mais je ne me laissais pas faire et ça n'a jamais dégénéré ! Pourtant c'était l'époque du machisme et du droit de cuissage !!! J'ai eu un papa gendarme qui m'a armé comme un garçon !!Et je ne l'ai pas encore croisé à mon Hyper U celui là !! On verra... Je me freine en ce moment ! Pal explosive....^^

    12
    Lundi 30 Mai 2011 à 20:24
    henri

    Je viens de prendre connaissance de ton blog. J'avoue que je n'ai pas eu le courage de lire l'analyse fouillée du livre, j'ai survolé. Je suis pour l'instant en plein visionnement des blogs de mes différents correspondants. Je reviendrai chez toi

    bientôt, j'espère.                Henri le dinosaure.

    13
    Lundi 30 Mai 2011 à 20:52
    Nina

    Moi aussi j'ai vraiment aimé ce livre, il démontre avec une véritable authenticité le monde du travail tel que nous pouvons le vivre. L'héroïne est toute en finesse, en intelligence face à cette énorme tentacule qui se referme sur elle. J'aime beaucoup cette auteure, j'avais baucoup aimé aussi "No et moi".

    14
    Mardi 31 Mai 2011 à 01:18
    Le Papou

    Ouf! Je le note pour les vacances euh.. c'est vrai je suis toujours en Vacances, bon je le note pour quand je serais trop heureux de vivre.

    15
    Mercredi 1er Juin 2011 à 05:43
    Philippe D

    Je rencontre souvent cette auteure sur les blogs mais je ne la connais pas du tout.

    16
    Mercredi 1er Juin 2011 à 14:21
    Philippe D

    Je crois que je vais me laisser tenter!

    Je vois aussi que mon dinosaure de père t'a laissé un message. Pas le temps de tout lire, lui? Quel paresseux!

    17
    Mercredi 1er Juin 2011 à 20:42
    Philippe D

    Eh bien voilà : j'en ai acheté deux (celui-ci et No et moi). Il me faut trouver le temps de les lire maintenant.

    18
    Samedi 4 Juin 2011 à 16:39
    Nina

    J'ai adoré ce livre, c'est une analyse très juste du harcèlement moral et du silence de tout ceux qui regardent sans rien dire la lente descente aux enfers de leur collègue. On parle de nouveau de ce roman en ce moment sur les blogs et ça me fait beaucoup plaisir.

    19
    Dimanche 5 Juin 2011 à 21:26
    Philippe D

    Voilà, j'ai fini celui-ci. Ca m'a bien plus mais c'est vrai qu'il ne faut pas déprimer quand on lit ça. Demain, je commence No et moi.

    A+

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